Erica Hennequin

"Politique et Cie"

Culture de la canne à sucre au sud de Belém

 Tag : agrocarburants   

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Après avoir roulé plusieurs heures sur une route asphaltée, puis sur un chemin de terre rouge, sans virage, poussiéreuse avant la pluie, boueuse après, nous traverçons les champs de canne à sucre - voir aussi: FSM en images.
Nous sommes dans la forêt amazonienne, cet écosystème qui produit un cinquième de l'eau douce de la planète et un cinquième de l'oxygène. Le but de notre voyage: Rio Bonito, Ulianapolis, où en 2007 environ un millier d'esclaves travaillant dans les champs de canne à sucre ont été libérés.
Rio Bonito se trouve dans l'Etat du Para, au nord du Brésil, là où la déforestation est la plus importante du pays. Dans certaines municipalités, elle atteint 80%, alors que selon la législation en vigueur, 80% du terrain doit être laissé en forêt.
Les habitants racontent leur arrivée à Rio Bonito en 1990, leurs difficultés de s'installer et leurs efforts pour travailler les terres de manière plus respectueuse de l'écosystème. Pagrisa est la seule usine de transformation de canne à sucre de l'Etat du Para. Elle produit soit du sucre, soit de l'éthanol, selon les prix du marché.
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Pour M. Zancaner,directeur de Pagrisa, l'entreprise joue un rôle social important dans le village. Il donne du travail à une partie de la population, organisée en association, qui plante de la canne à sucre sur ses propres terres. Il parle d'un partenariat et de l'importance sociale du projet qui est sa principale motivation. Les bénéfices ont moins d'intérêt pour lui, d'ailleurs, il n'a pas fait de bénéfice en 2008. Au total, il possède 12'000 hectares et il souhaite augmenter la production.
La version des responsables de mouvements sociaux et de défense des droits humains est tout autre. L'entreprise a acheté deux petits avions la même année, malgré la diminution du prix du carburant. D'autre part, Pagrisa est toujours en procès, car elle a fait recours à sa condamnation par la justice pour l'exploitation de travailleurs dans des conditions d'esclavage en 2007.
Aujourd'hui, elle a amélioré les conditions de travail, mais elle maintient l'association dans une situation de dépendance. Elle finance par exemple deux institutrices sur les trois qui tranvaillent dans la communauté ainsi que l'infirmière au poste de santé. Elle a absolument besoin d'améliorer son image, mais dans le même temps, cette présence divise le village.
Dans le Para, d'autres esclaves ont été libérés récemment. Les champs de canne à sucre sont généralement très éloignés, d'où la difficulté de contrôler les conditions de travail et de vie. Les travailleurs dépendent totalement de leur employeur: pour le logement, la nourriture, l´habillement, l'hygiène, la santé, la sécurité au travail etc. et dans le cas de Pagrisa, non seulement ces besoins de base n'étaient pas assurés, mais ils ne touchaient que partiellement leur salaire .
Le discours de nos interlocuteurs varie peu; que l'on parle de canne à sucre ou de soja, deux produits d'exportation, ce sont des monocultures qui nécessitent de grandes quantités de produits chimiques et de terrains. Or, les conflits pour la terre causent d'importantes atteintes aux droits humains. On peut constater que les régions où la déforestation est la plus importante correspondent également à celles où les atteintes aux droits humains sont les plus nombreuses.
Six mille esclaves ont été libérés en 2007 et 2500 en 2008. Chacun sait que le problème n'est pas résolu et cette question doit aussi interpeller ceux qui bénéficient de l'exportation de ces produits.
Ecrit avant le début du Forum Social mondial à Belém, Para, dans le cadre du pré-programme, organisé par E-changer pour la délégation suisse.

Sur le même sujet dans le Courrier du 28 janvier 2009: Nourrir les voitures?
Lire aussi dans le Spiegel du 23 janvier 2009 l'article "Du sang dans le réservoir" (en allemand)

Pour lire la demande de moratoire déposée au Parlement jurassien le 28.01.09, cliquer ICI

Par erica-hennequin, le 28/01/2009 à 23h01


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